Le vélo mérite une plus grande place à Dieppe
La bicyclette s’impose dans le paysage dieppois. Seulement, se déplacer en cycle n’apparait pas toujours sécuritaire. Pourtant, la Ville et l’Agglo Dieppe-Maritime auraient tout à gagner de changer de braquet dans ce moyen de transport.
Dans le Journal de bord de Dieppe du mois de juin, parmi les dix chantiers phares du coeur de ville, on pouvait lire comme dixième action emblématique de la municipalité : Le vélo trouve sa place.
“ Sas matérialisés aux feux, doubles-sens cyclables, pistes dédiées, stationnements sécurisés, aides à l’acquisition… Le vélo gagne du terrain. ‘’
Journal de bord, juin 2023.
Ayant utilisé la petite reine dans les rues de Dieppe ces derniers mois, je trouve que la ville n’est pas toujours bien adaptée. Aussi, j’ai voulu creuser un peu le sujet.
Prix du clou rouillé en 2012
Rappelons tout d’abord que la cité d’Ango s’est vue décerner le prix du clou rouillé en 2012 par la Fédération Française des Usagers de la Bicyclette (FUB). La ville normande manifestait alors aux yeux de l’association une régression en matière d’aménagements cyclables.
On peut noter que des ajustements ont toutefois été réalisés par la Ville ces dernières années. En revanche, il semble manquer d’une réelle ambition pour que la bicyclette soit pleinement considérée comme un transport actif dans la ville aux quatre ports.
Un budget trop limité
Première surprise : le budget. La Mairie de Dieppe a accordé 26 000€ au cycle pour l’année 2023. Soit moins de 1€ par habitant.
Un plan vélo national a pourtant été annoncé par Élisabeth Borne avec 2 milliards d’euros d’investissements d’ici à 2027. La FUB préconise elle un budget de 30€ par habitant par an. Il manquerait autour des 874 000€ à Dieppe et la Communauté d’Agglomération Dieppe-Maritime pour réaliser des infrastructures dignes de ce nom. A noter que c’est dorénavant l’Agglo qui a la compétence depuis la loi LOM (Loi d’Orientation des Mobilités). Cependant l’intercommunalité n’a pour l’instant alloué que du budget pour les services (location de vélo à la gare de Dieppe). On ne peut nier le manque d’argent actuel des communes. En revanche, la bicyclette devrait de nos jours recevoir autant d’attention que les engins motorisés. Par exemple, des parkings à moto viennent juste d’être installés au centre-ville.
Sur le terrain
“Alors que la moitié des déplacements en voiture font moins de cinq kilomètres, le vélo doit avoir toute sa place” lançait la première ministre en mai dernier. C’est là que le bât blesse à Dieppe. Beaucoup de ses habitants ont peur d’y rouler. Le problème : il n’existe pas de continuité dans les infrastructures cyclables.
J’ai interrogé mon entourage à ce propos. Par exemple, ma soeur interdit à son fils de 14 ans d’aller du Pollet à Rouxmesnil-Bouteilles soit 4,3km. Pourtant, plus de la moitié du trajet peut se faire sur l’Avenue verte Londres-Paris… Sauf qu’il n’y a pas d’espace sécurisé jusqu’à la gare de Dieppe. Je vis le même dilemme de mon côté. De la plage à l’école De Broglie, je n’ose pas emmener mon fils de 8 ans à vélo.
Le danger est-il si réel ? Ce n’est pas si sûr. La peur des automobilistes l’est en revanche. Quand il faut traverser un rond-point, en tant que cycliste, on ne se sent pas en sécurité.
Tout d’une grande
Encore une fois des agencements ont été effectués. Mais peut-être faudrait-il les mettre d’avantage en avant. Un exemple, la Ville de Dieppe a aménagé des rues situées en “zone 30” en double-sens cyclable. C’est le cas de la rue de l’Epée. Aussi, il m’est arrivé plusieurs fois que les automobilistes m’invectivent de la prendre en contre-sens. Peut-être faudrait-il davantage de communication ? Une culture vélo est difficile à développer après toutes ces années du “tout-voiture’’.
Judicaël Gaspard, membre de l’association Dieppe & Co à Vélo voit pourtant Dieppe comme une ville qui se prêtre parfaitement à la pratique de la bicyclette.
“ La zone 30 est un vrai plus. Les espaces de stationnement à l’hippodrome et la gare aussi. On a un coeur de ville magnifique et des grands circuits cyclo-touristiques comme l’Avenue verte, la Route du Lin ou la Vélomaritime. En plus, la population et les commerçants accueillent favorablement ce transport actif.”
Judicael Gaspard, Dieppe Vélo & Co.
Des travaux attendus
Cependant, il reproche une politique municipale “décousue’’. Le Quai Henri IV, par exemple, est une zone 30. Qui ose la remonter en contre-sens aujourd’hui ? La rue n’a pas été pensée pour les vélos, d’ailleurs la voie cyclable venant de la Plage s’arrête brusquement en haut des quais.
Et l’associatif de rajouter:
“ La Ville pourrait financer les questions d’apaisement (zone 30), de signalétiques, d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap et personnes âgées, le lien social, l’aide à l’achat d’un vélo neuf mais aussi d’occasion, et la sensibilisation des habitants.’’
Judicaël Gaspard, Dieppe Vélo & Co.
Une information plus détaillée serait en effet bienvenue : via le Journal de bord, les réseaux sociaux ou encore des agents sur le terrain.
Enfin, d’autres travaux plus importants sont attendus par les cyclistes des communes voisines pour se rendre à Dieppe. Par exemple, à Martin-Eglise ou Hautot-sur-mer.
Un projet dans les “S de Pourville’’ (D75) avait pourtant été annoncé par la presse locale il y a peu. Porté par l’Agglo, des travaux devraient permettre une sécurisation de la route pour les vélos et piétons qui l’empruntent de plus en plus. L’ayant pratiqué pas plus tard que ce week-end, le partage de la route n’est en effet pas rassurant. Un accident mortel avait beaucoup choqué il y a quelques années. Le dossier est encore très embryonnaire selon l’Agglo. Espérons que la politique vélo dieppoise passe, dans les années à venir, à la vitesse supérieure.